LA COUR SUPÉRIEURE ET LE TRIBUNAL DE LA JEUNESSE : COMMENT DISTINGUER LES COMPÉTENCES DE CHACUN

En raison de la pluralité de cours et de tribunaux qui sont créés par la loi, il est parfois difficile de s’y retrouver et de distinguer les compétences de chacun. En effet, comment savoir s’il faut se présenter devant la Cour du Québec, la Cour supérieure ou le Tribunal administratif du Québec, pour ne nommer que ceux-là ?

La réponse courte est que cela est prévu à la loi. Par conséquent, chaque tribunal a un rôle défini et est créé pour régler des litiges de différentes natures.

Certaines de ces compétences sont prévues au Code de procédure civile pour ce qui est de la Cour du Québec et de la Cour supérieure, mais d’autres lois particulières viennent s’y annexer afin de préciser et d’ajouter à celles-ci. Parmi ces lois particulières, on peut nommer la Loi sur les tribunaux judiciaires (ci-après L.t.j.), la Loi sur la protection de la jeunesse (ci-après L.p.j.) et la Loi sur le système de justice pénale pour adolescents (ci-après L.s.j.p.a.).

La Cour supérieure du Québec : une compétence universelle.

Le Code de procédure civile prévoit que :

La Cour supérieure est le tribunal de droit commun. Elle a compétence en première instance pour entendre toute demande que la loi n’attribue pas formellement et exclusivement à une autre juridiction ou à un organisme juridictionnel.

C’est ainsi que, pour alléger le fardeau de la Cour supérieure, diverses lois ont été adoptées pour retirer certains sujets précis de cette compétence universelle, afin de les redistribuer à d’autres cours et tribunaux administratifs.

D’un autre côté, il y a certains sujets dont la Cour supérieure est seule compétente, tels que les actions collectives, les demandes d’injonction et les demandes en contrôle judiciaire des décisions des tribunaux administratifs.

Parallèlement, dans les matières relatives au droit de la famille, la Cour supérieure peut, par exemple, entendre des demandes relatives :

  • Au divorce;
  • À la séparation de corps des époux;
  • À la pension alimentaire pour enfants ou pour le conjoint ou la conjointe;
  • Au choix du milieu de garde ou d’école de l’enfant;
  • À une demande de droits d’accès présentée par une tierce personne après qu’un jugement d’adoption ait été rendu par la Cour du Québec;
  • À la perte d’un des attributs de l’autorité parentale;
  • Aux relations entre l’enfant et ses grands-parents.

Somme toute, si vous êtes dans un litige et que vous avez à déposer une demande à la cour, ce sera la plupart du temps fait à la Cour supérieure du Québec, à moins qu’une loi n’exige que vous déposiez cette demande devant une autre cour ou tribunal.

La Cour du Québec : des compétences précises.

La Cour du Québec, quant à elle, est une cour qui détient des compétences très larges, mais qui lui sont toutefois attribuées de manière précise par la loi.

Ainsi, la L.t.j. prévoit que la Cour du Québec est divisée en trois chambres :

  • La chambre civile;
  • La chambre de la jeunesse;
  • La chambre criminelle.

La chambre civile traite, par exemple, de toute demande dont la valeur du litige est inférieure à 85 000$ (en date de mars 2018) et de la garde d’une personne dans un établissement de santé ou de services sociaux en relation avec une évaluation psychiatrique.

La chambre de la jeunesse (aussi appelé «Tribunal de la jeunesse») traite notamment des demandes d’adoption, des demandes relatives à la protection de la jeunesse régies par la L.p.j. et des demandes relatives à la justice pénale pour adolescents régies par la L.s.j.p.a.

La chambre criminelle, quant à elle, est compétente notamment pour traiter de la grande majorité des infractions criminelles et des infractions sommaires qui sont prévues au Code criminel ou à d’autres lois pénales.

Les compétences du Tribunal de la jeunesse.

Tel que mentionné précédemment, le Tribunal de la jeunesse (ci-après le «Tribunal») est une des trois divisions de la Cour du Québec.

En premier lieu, le Tribunal est le seul qui peut entendre les demandes d’adoption d’un enfant.

En second lieu, les demandes sur des sujets qui sont reliés à la protection de la jeunesse seront également présentées par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse devant ce Tribunal, par exemple :

  • Lorsque la sécurité ou le développement d’un enfant sont considérés compromis;
  • Lorsqu’il y a raison de croire que les droits de l’enfant ont été lésés.

À cette fin, le Tribunal peut ordonner diverses mesures lorsqu’il est d’avis que la sécurité ou le développement d’un enfant sont compromis. En effet, le Tribunal peut ordonner entre autres que :

  • L’enfant soit gardé dans son milieu familial ou chez l’un ou l’autre de ses parents;
  • L’enfant n’entre pas en contact avec les personnes que le Tribunal désigne;
  • L’enfant reçoive certains soins et services de santé spécifiques;
  • L’enfant soit confié à une famille d’accueil;
  • Certains attributs de l’autorité parentale soient retirés aux parents;

De même, le Tribunal peut également autoriser le maintien des relations personnelles de l’enfant avec ses parents, grands-parents ou une autre personne ou encore préciser durant quelle période l’enfant sera confié aux personnes qu’il désigne.

En troisième lieu, le Tribunal peut entendre des demandes concernant la justice pénale pour adolescents. Il s’agit principalement d’une compétence à l’égard de toute infraction commise par une personne durant son adolescence, soit la période définie comme étant celle comprise entre 12 et 18 ans. D’ailleurs, même une fois devenue majeure, ce sera toujours ce Tribunal qui sera compétent pour juger de l’infraction qu’elle aura commise durant son adolescence.

Toutefois, il faut faire attention car certaines infractions sont retirées de la compétence du Tribunal de la jeunesse et confiées à la Cour supérieure du Québec, telle le meurtre. De plus, lorsque l’adolescent a choisi d’être jugé par un juge et un jury ou lorsque le Directeur des poursuites criminelles et pénales demande une sentence pour adultes, ce sera la Cour supérieure du Québec qui sera compétente, et non plus le Tribunal de la jeunesse.

En dernier lieu, lorsque le Tribunal est compétent pour entendre une demande relative à l’adoption ou à la protection de la jeunesse, il sera aussi compétent pour entendre des demandes qui lui sont reliées ou «accessoires». Par exemple, si la demande principale concerne une adoption, le Tribunal pourra également rendre un jugement par rapport à la garde de l’enfant, son émancipation, l’exercice de l’autorité parentale, etc.

Bref, ce survol des distinctions entre les compétences de la Cour supérieure du Québec et du Tribunal de la jeunesse permet de constater que le droit procédural régit une multitude de situations. Les questions en litige devenant souvent complexes, n’hésitez-pas à recourir à un de nos avocats afin de veiller au respect de vos droits.